J’étais tranquillement en train d’effectuer une recherche sur Internet quand de liens en liens je suis tombé sur cet article : Affaire Coupat : « L’insurrection qui vient » affole les Américains. Tout d’abord intrigué par ce titre, je décide d’aller lire l’article, une question en tête : en quoi ce bouquin anonyme attribué à Julien Coupat peut-il bien affoler la patrie du libéralisme?
Mais avant toute chose, petit retour historique : Julien Coupat, pour ceux qui ne se souviennent pas, est cet horrible terroriste anarcho-autonome qui voulait renverser la société en perturbant le trafic des TGV. Le 11 novembre 2008, une vingtaine de personnes sont arrêtées dans une ferme près de Tarnac (Corrèze), neuf d’entre elles seront mises en examens pour actes de terrorisme car soupçonnées d’avoir participé aux sabotages des lignes TGV survenus quelques jours plus tôt. Au terme d’une opération de police digne d’un film hollywoodien et d’une enquête Kafkaïenne les seules preuves rassemblées contre les désignés coupables furent : leur présence à proximité des lieux de sabotage, de la littérature insurrectionnelle, révolutionnaire et anarchiste et surtout du matériel de terrorisme, à savoir : une échelle… Après une phase d’emballement judiciaire et médiatique, l’affaire s’est vite dégonflé comme un ballon de baudruche tournant en ridicule l’antiterrorisme, la justice et la ministre de l’intérieur Michèle Alliot Marie, ce qui pourrait prêter à sourire si Julien Coupat n’avait pas passé 7 mois en prison faisant les frais de la toute récente paranoïa du ministère de l’intérieur concernant les groupes anarchistes autonomes. Et pourtant dès le 10 novembre, soit la veille des arrestations, un groupe d’écologistes radicaux allemand avait revendiqué les sabotages.
Que raconte ce livre ? En (très) bref : il part du constat d’absurdité et de déliquescence de la société de consommation, du système politique et de l’économie capitaliste, et lance un appel à la révolte, donnant les raisons autant que les moyens d’une révolte destinée à inverser la vapeur et à faire émerger une société basée sur l’autogestion. En France ce livre ne fit pas de vagues, faisant partie d’une littérature politique d’extrême gauche à la diffusion confidentielle, et n’étant que l’expression d’une frange du paysage politique. Par contre aux USA où une traduction va bientôt paraître, il a retenu l’attention d’un chroniqueur ultraconservateur de Fox news : Glenn Beck. Bien connu des Américains pour ses harangues fustigeant le gouvernement Obama, la gauche, les athées et d’une façon générale tout ce qui ne semble pas ressembler à un American Dad. Que cet homme qui déclare rêver de tuer Mickael Moore, ou traite de « sac à merde » le père d’un GI décapité en Irak (qui avait critiqué le gouvernement Bush) se soit fait un gros flip en voyant de la littérature anar en vente libre à Washington DC, n’a rien de surprenant, mais c’est le ton employé, caractéristique de certains médias aux état unis qui m’a le plus interpellé. Je vous invite à regarder la vidéo (traduite pour les non bilingues ou ceux qui auraient pris Allemand première langue).
Sur fond d’images des émeutes de 2005 Glenn Beck nous sort un prêche sur les horribles gauchistes qui veulent détruire la société en prenant les armes, une nouvelle forme de terrorisme qu’il faudrait éradiquer avant qu’elle ne prennent de l’ampleur. Et si on l’écoute, le monde serait mis à feu et à sang par de dangereux révolutionnaires (même les Japonais manifestent : « il ne font pas ça d’habitude !») et seul les USA semble y échapper, mais plus pour longtemps. En opposant ce livre (qu’il n’a pourtant pas lu) au sien qu’il agite comme une bible à tout bout de champ, il définit les rôles de chacun dans son petit théâtre : une gauche créatrice de troubles face à ses amis conservateurs « bienveillants » pour le pays. En mélangeant contestation sociale, émeutes des banlieues et théories révolutionnaires, Glenn Beck déterre le vieux spectre du bolchevique le couteau entre les dents pour faire trembler l’Américain moyen sur fond de menace terroriste. En bref une nouvelle mise en scène démagogique du terrorisme au but politique à peine voilé.
À suivre quelques photos prises lors d’une manifestation de soutient aux inculpés de Tarnac, ayant eu lieu à Paris en Janvier 2009.
Seules violences à déplorer lors de ce rassemblement de révolutionnaires en puissance : quelques tirs de feux d’artifice (sûrement achetés chez Tati) sur les forces de l’ordre. Apparemment le grand soir n’était pas au programme, n’en déplaise à Glenn Beck. Mais dès qu’il aura fini de lire « the coming insurrection », je lui conseille de prêcher pour une vigoureuse campagne de bombardement de tous les magasins Tati, car c’est là que semblent se fournir ces terroristes.
Adrien
(Photos: Copyright Adrien Labit)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire